Résumé :
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Dans cet article fondamental, publié après sa mort, Winnicott décrit la crainte de leffondrement quil constate chez certains patients mais qui renvoie selon lui à un phénomène universel. Le terme original « breakdown » est volontairement vague. On peut le traduire en français par panne, rupture, détérioration, effondrement, et cest donc ce dernier terme qui a été choisi pour les traductions françaises. Winnicott postule que cette crainte renvoie à leffondrement dun système de défenses. En loccurrence non pas des défenses névrotiques contre langoisse de castration mais plutôt des défenses contre la désorganisation du self. Dans la régression à la dépendance impliquée dans lanalyse, on assiste ainsi selon Winnicott à linversion du processus de maturation de lindividu. Winnicott récapitule alors brièvement les étapes et les conditions du développement émotionnel précoce quil a déjà exposées auparavant. Lindividu évolue progressivement de la dépendance absolue à une relative indépendance à condition quil puisse sappuyer sur un environnement facilitateur : holding puis handling et présentation dobjet. Dans létat de dépendance absolue, le moi nest pas encore dissocié du non-moi. Au stade précoce, lindividu peut être alors confronté à des états que Winnicott nomme « primitive agonies », qui ont été traduits par « angoisses sans nom » ou par « angoisses disséquantes primitives ». Ces angoisses peuvent être le retour à un stade de non-intégration, tomber sans fin, léchec de lintégration psyché-soma, la perte du sens de la réalité, la perte de la capacité à être en lien avec les autres. Ces angoisses sont impensables et ce que nous observons cliniquement est toujours une organisation défensive, y compris la maladie psychotique. Winnicott en vient alors au cur de son propos : il postule que la peur de leffondrement dans la cure est relative à un effondrement qui a déjà eu lieu, une angoisse disséquante qui est responsable de lorganisation défensive actuelle. Le patient a besoin quon lui dise à un moment ou à un autre que cet effondrement a déjà eu lieu. En effet, cela renvoie à une expérience précoce qui na pu être éprouvée à proprement parler puisque le moi était alors trop immature et indifférencié pour lintégrer. Une fois cet état de fait reconnu, le patient sera prêt à faire lexpérience de cette angoisse dans le transfert, et à intégrer dans laire de son omnipotence les erreurs de lanalyste rappelant les failles de lenvironnement primaire. Cest difficile et douloureux mais cela vaut mieux quune analyse superficielle, une analyse pour rien, qui éviterait les zones psychotiques de la personnalité. Winnicott insiste sur le fait quil ne sagit pas tant de se souvenir, comme dans une analyse de névrose, que déprouver dans le transfert quelque chose qui sest produit à un moment où il ny avait pas de moi constitué pour avoir conscience et véritablement éprouver ce qui se passait. Le passé et le futur sactualisent dans lici et maintenant du transfert, et cette expérience est léquivalent de la levée du refoulement dans lanalyse de la névrose.La peur de la mort, voire lobsession du suicide, peut être rapportée de la même façon à une expérience danéantissement dans le passé. Winnicott cite également le vide et la non-existence comme des sentiments qui doivent être éprouvés dans le transfert pour que le patient puisse enfin sen dégager. Après tout, le vide est un prérequis au désir, et cest seulement à partir de la non-existence que lexistence peut émerger. Enfin, Winnicott ouvre la question de la fonction défensive de ces éprouvés ; la non-existence peut ainsi permettre déviter les sentiments de persécution et de responsabilité. [Résumé d'éditeur]
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